Un vivier de talents à valoriser
Dernière mise à jour : 27 juil. 2022
L’autisme ne concerne pas que les enfants et ne s’arrête pas à la fin de la scolarité, l’inclusion doit se poursuivre dans le monde professionnel. C’est une triste évidence, la grande majorité des personnes autistes peine à trouver un emploi et à le conserver. Non pas par manque de capacités, de motivation ou d’énergie, mais parce que beaucoup d’employeurs ignorent les atouts qu’une personne autiste peut offrir à l’entreprise. De fait, il existe un énorme réservoir de talents qui attend à la porte des entreprises d’avoir l’opportunité de montrer de quoi ils sont capables. Les personnes autistes ont besoin qu’on les soutienne et qu’on leur donne l’occasion d'apporter leur valeur ajoutée à notre économie.
Des compétences et des capacités cognitives hors norme
Les personnes autistes peuvent apporter leurs compétences et leurs capacités au monde du travail. Lorsque nous faisons quelque chose, nous avons souvent besoin de bien faire, nous n’aimons pas l'échec. Nous pouvons passer des heures, concentré sur une tâche même si celle-ci est répétitive ! Nous sommes productifs et développons une vraie conscience professionnelle : qualités très recherchées pour les métiers où la vigilance et précision sont demandés.
L’aspect social du travail tel que les pauses pauses-café ou cigarettes, sont souvent un obstacle. Certaines personnes aimeraient bien y assister mais n’osent pas, par peur de ne pas savoir comment agir (est-ce le moment, combien de temps cela doit-il durer), tandis que d’autres y assistent au prix d’intenses efforts qui les épuisent pour le reste de la journée.
Si 70 % des autistes ont une intelligence dans la norme, ils sont souvent autodidactes, apprennent beaucoup par eux-mêmes car fonctionnent par passion et s'impliquent à 200 % grâce à une grande capacité d’investissement et d'énergie. Nous avons une excellente mémoire photographique très pratique pour traiter des informations ou des chiffres. Les postes adaptés aux personnes dites "Asperger" présentent le plus souvent un caractère logique et/ou structuré. Le choix est donc large ! Evitez cependant les tâches demandant des relations sociales ou une pensée abstraite, comme celles d'un commercial.
Mais la compétence principale, c’est la rigueur dans tous les sens du terme. A la fois dans l’assiduité dans le travail où nous sommes extrêmement précis, que dans la ponctualité car nous ne sommes jamais en retard ou absent. Ce qui nous vaut d'être ponctuel, honnête et loyal. Un atout majeur dans le monde du travail !
Quelques grandes entreprises l'ont bien compris, comme SAP ou IBM, EDF, Airbus ou bien ANDROS qui réservent depuis quelques années des postes à des autistes, quitte à aménager un peu leur environnement de travail. Mais ces exemples de discrimination positive sont encore trop rares.
A visionner : Quelle est la place des autistes dans un monde du travail de plus en plus compétitif où l’habileté sociale est décisive ? Témoignage de Josef Schovanec, autiste de haut niveau.
Des aménagements simples
Mais la grande difficulté d'une personne autiste, même Asperger, est de conserver un emploi par le manque d'aménagements. Le manque d'engagement des employeurs traduit une méconnaissance de la réalité de ce handicap dit « invisible ». Par expérience, il me semble que l'invisibilité entraîne le doute chez les collègues quant à l'existence de ce handicap. De même, beaucoup de personnes autistes n’osent pas aborder ce sujet avec leur employeur et leurs collègues.
C'est pour cela qu'avec Bastien, nous souhaitons largement communiquer et vous présenter nos préconisations relatives au monde de l'entreprise et de l'emploi. Cette plaquette a été conçue pour battre en brèche les préjugés et la méconnaissance qui engendre l'anxiété et favorise le recours aux stéréotypes. Il faut rendre visible le handicap invisible qui a des conséquences toutes particulières dans l'entreprise, lieu d'inclusion sociale. Car, la plupart du temps, accueillir une personne autiste fait peur et les aménagements de poste restent trop rares.
L’hypersensibilité des personnes autistes nécessite quelques aménagements pour les entreprises. Lors d'un précédent travail, je n’avais pas dit que j’étais autiste parce que je ne voulais pas me mettre de frein supplémentaire. Mais les conditions de travail ont été épuisantes pour moi parce que je travaillais dans un open-space de 6 personnes, avec un téléphone par personne pour de nombreux contacts commerciaux. C’était beaucoup de sollicitations sensorielles, donc à la fin de la journée : j’étais épuisée.
Des aménagements restent accessibles pour les entreprises comme la disposition d'un bureau non partagé ou du réaménagement des espaces existants, d'un coin pour s’isoler quelques minutes pour se reposer. Des équipements spécifiques contre le bruit (bouchons mousse, bouchons en silicone, casques antibruit) peuvent être pris en charge par l'AGEFIPH ou le FIPHFP.
De même, faire passer l’information au reste de l’équipe est essentiel afin que les collègues ne se vexent pas si la personne ne vient pas avec eux faire une pause, mais qu’ils continuent à l’intégrer. Il faut sensibiliser les collègues afin de réussir l’intégration.
Processus de recrutement et d'intégration
Les procédures de recrutement peuvent créer par inadvertance des barrières pour les personnes autistes. La plupart des adaptations, souvent mineures, nécessaires aux candidats autistes, peut également profiter à l'ensemble des candidats, renforçant ainsi l'efficacité générale du recrutement.
L'annonce d'emploi
Les annonces d’emploi et descriptions de postes doivent être concises, clairement présentées et écrites en français simple. Elles doivent lister uniquement les compétences essentielles, et éviter le jargon ou les informations inutiles. Avant l’entretien, il est essentiel de donner des informations claires sur les objectifs de l’entretien (durée de l'entretien, tests), sur les documents à apporter, et envoyer par mail ou courrier ces informations aux candidats, ainsi que des informations précises sur le lieu de l’entretien.
Les tendances actuelles, comme l'entretien téléphonique ou le recrutement-vidéo en premier filtrage de recrutement, sont à proscrire. Au téléphone, il est difficile pour un autiste de décoder à quel moment il faut parler. La vidéo est quant à elle un obstacle important car elle va principalement juger le non-verbal qui va être mal interprété par le recruteur.
L'entretien de recrutement
La plupart des entretiens d'embauche vont chercher à cerner les « Soft Skills » des candidats. L'entretien d'embauche apparaît alors comme une barrière très discriminante pour une personne autiste qui joue mal la comédie sociale attachée à ce rite de passage. Elle échoue aux tests psychologiques dont elle ne déjoue que rarement les pièges. Tout comme les entretiens collectifs, les processus de recrutement trop complexes sont évités par les personnes autistes qui préfèrent souvent se tourner vers des petites ou moyennes entreprises réputées pour leurs démarches simplifiées.
Envisagez de proposer un entretien adapté, avec des questions « fermées », basées sur les expériences passées des candidats, plutôt que des questions « ouvertes » (d’ordre général ou hypothétiques). La façon dont le candidat maintient ou non le contact avec les yeux ou la façon dont il se comporte avec son corps peut être différente de celle des autres candidats. Evitez d’en tenir compte comme une indication sur ce qu’il pense du poste.
L'embauche et l'intégration dans l'entreprise
Avant le premier jour, il est conseillé d’envoyer au nouveau collaborateur toute la documentation liée à son intégration préalablement avant sa prise de poste, avec des informations précises sur les attentes de la journée, les pauses, les congés, les horaires de travail, le code vestimentaire et les attentes sociales. Faites comme si vous embauchiez un collaborateur venant de l'étranger. Enfin, mettez en place des réunions d’information pour préparer et former vos collaborateurs avant l'arrivée de ce nouveau collaborateur.
Au démarrage dans le poste, donnez au salarié des consignes claires et par écrit sur ce qu’il doit faire exactement pour mener à bien ses tâches, du début jusqu’à la fin, car c’est ce qui lui servira de base pour acquérir de bonnes pratiques de travail. Vous éviterez ainsi de déstabiliser votre collaborateur avec des incertitudes ou des changements de dernière minute… Demandez à ses collègues de faire preuve de patience et à ses supérieurs de tact et de clarté. Une compréhension générale de l’ensemble de l’équipe aidera le salarié à s’intégrer sans aucun stress !
En adoptant ces quelques mesures simples, les entreprises se mettront aussi en conformité avec la loi de 2005 sur l’insertion des personnes en situation de handicap, qui préconise d’adopter des mesures « appropriées et raisonnables » pour le recrutement et l’emploi des personnes handicapées. Un bon processus de recrutement et de management des personnes autistes, c’est un bon processus de management tout court.
Retrouvez un webinar sur la gestion des talents des Aspergers par Grenoble Ecole du management
Vous avez encore des questions sur l'autisme ou les aménagements que vous pouvez mettre en place ?
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Vous pouvez aussi nous joindre par mail : collectifentraide.autisme44@gmail.com
L'autisme est l'affaire de tous et vous avez un rôle à jouer !
Avec le soutien de LADAPT des Pays de la Loire, nous serons heureux de vous offrir cette plaquette et vous présenter des informations et des conseils sur ce sujet lors du Forum « Emploi & Handicap » le mardi 20 novembre, à partir de 14h, au Parc des expositions de la Beaujoire à Nantes.