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Interdépendance entre la maltraitance infantile et l'autisme



Les personnes en situation de handicap sont davantage victimes de maltraitance et particulièrement les femmes. De nombreux états pathologiques physiques ou psychiatriques peuvent trouver leur origine dans une maltraitance infantile. Si les neurologues, les psychiatres, ... ne s'en inquiètent pas, on peut facilement passer à côté, les personnes en souffrance faisant rarement le lien entre leurs symptômes actuels et ce passé.


Si on a été mal traité physiquement ou psychologiquement dans l'enfance, on a beaucoup plus de risque de souffrir d'un problème psychologique à l'âge adulte avec une grande diversité dans les conséquences possibles et une atteinte dans différentes sphères de fonctionnement. Cela peut amener parfois à des erreurs diagnostiques, par omission des séquelles que peut laisser à l'âge adulte la maltraitance ayant eu lieu dans l'enfance, diminuant les chances de s'en sortir et d'aller mieux.


Le mode de fonctionnement relationnel dans l'autisme de haut niveau (anciennement syndrome d'Asperger) est marqué, entre autre, par l'évitement du contact visuel, la difficulté à aller vers les autres, la difficulté à reconnaître les émotions d'autrui et, de ce fait, à s'adapter à ce qu'ils ressentent, les capacités d'empathie et de réciprocité limitées, les difficultés de mentalisation. Mais ces symptômes peuvent aussi être la résultante de maltraitances. C'est dire la complexité des choses et des diagnostics différentiels.


La maltraitance infantile

La dépendance inhérente à l'enfance rend l'enfant plus susceptible d'être maltraité. Aujourd'hui, le risque de victimisation infantile dans la population générale est de 58 % ! La victimologie infantile est différente de la victimologie générale. Le même événement subi à 30 ans ou en plein développement des fonctions cérébrales d'un enfant n'a pas le même impact sur l'avenir. Sont donc à considérer comme des traumatismes infantiles des événements jugés négatifs mais sans gravité par l'adulte qui n'a pas de connaissance des périodes charnières dans le développement psychoaffectif de l'enfant. En termes d'âge, la petite enfance jusqu'à 4 ans ou l'adolescence sont des périodes plus fréquemment associées à la maltraitance. (Cf. le compte-rendu "Troubles psy & traumatismes : une association évidente ?").


La maltraitance infantile regroupe les agressions physiques, psychologiques, les abus sexuels et la négligence, elle peut être perpétrée par l'entourage, les pairs, la fratrie. Elle peut avoir des conséquences très diverses en fonction de l'âge où elle survient, en fonction de sa nature, de sa précocité, de sa fréquence... La maltraitance précoce impacte le développement psycho-affectif normal de l'enfant, l'empêchant de développer un sentiment de sécurité affective, une sérénité, une confiance en soi, une perception adaptée des autres, l'empêchant de faire, voire de savoir ce qu'il aime. Elle entrave finalement la capacité de se lier aux autres.


La maltraitance s'observe davantage quand l'enfant n'a pas été désiré, quand il ne correspond pas aux attentes du parent, quand l'enfant a des besoins particuliers, une disgrâce, une faiblesse physique, un handicap. Malheureusement, ces situations le rendent plus à risque d'être maltraité. Les difficultés dans les habiletés sociales caractéristiques de l'autisme sans déficience intellectuelle de type Asperger peuvent être une cause et /ou une conséquences des traumatisations de l'enfance. Des traumatismes peuvent se surajouter et aggraver un problème préexistant. La famille serait, dans environ 70 % des cas, le lieu d'exercice de la maltraitance envers les personnes handicapées, et les institutions pour 30 % (source : Sénat).


Les troubles envahissants du développement (non spécifiés)

Les objectifs, quand on est autiste, que l'on a subi de la maltraitance et que le concept de soi est inconnu, sont d'apprendre à être conscient de sa manière de penser et de ressentir, de découvrir ses qualités, d'apprendre à observer les signaux ayant un impact positif, d'observer toutes ses ressources et de les utiliser au service de ses aspirations. Le soi reconstitué sera en même temps un historien capable de raconter avec cohérence et bienveillance l'histoire de sa vie et un voyant capable de faire des plans détaillés sur l'avenir pour aller dans le sens de ce que l'on aimerait être.


Autiste à l'âge adulte, si l'on souffre de comorbidités comme par exemples de trouble obsessionnel compulsif, de trouble des conduites alimentaires, d'un problème d'attachement, d'un TDA/H (trouble du déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité), de troubles de l'humeur, d'addictions, … il est important de rechercher également la présence d'un trouble dissociatif, car il leur est fréquemment associé.


Il est compliqué pour les personnes autistes de déchiffrer les émotions (les siennes et celles des autres). Soit on nous apprend à ressentir, à nommer et à accepter avec bienveillance nos émotions et, dans ce cas, elles se résorbent naturellement ; soit on subit des épreuves précoces difficiles, on n'a pas la chance d'avoir un entourage à même de nous faire réaliser cet apprentissage et, dans ce cas, on ne sait pas accepter ses émotions, on apprend à les fuir et à les éviter. Lorsque notre trouble a été négligé dans l'enfance, outre le travail sur les traumatismes eux-mêmes, il sera important de réaliser des apprentissages qui n'ont pu se faire, de s'entraîner pour acquérir de meilleures compétences dans la régulation émotionnelle et dans les relations interpersonnelles.


Les personnes autistes souffrent d'un manque de mentalisation ou théorie de l'esprit. C'est-à-dire d'un processus du cerveau qui va combiner plusieurs sources d'information (par exemple visuelles, auditives...). C'est un outil formidable puisqu'en sachant attribuer des états mentaux, à soi-même et aux autres, on est capable de prévoir les comportements d'autrui, de se sentir bien avec eux, d'être populaire, de ne pas répondre forcément à la violence par de la violence notamment face à l'autorité, d'avoir des relations de bonnes qualités. Et, si cette capacité à mentaliser est acquise dans l'enfance, elle protège des conséquences des traumatismes : elle fait passer le risque de développer des séquelles psychologiques à l'âge adulte de 97 % à 17 %.


La théorie de l'esprit peut aussi s'acquérir via le développement des fonctions exécutives. En développant ses fonctions exécutives, on développe l'habileté à deviner les autres. Sauf que ses fonctions sont déjà altérées chez les personnes autistes.

Pourtant, les fonctions exécutives sont des fonctions importantes dont on se sert tous les jours. Ce sont des fonctions du cerveau qui permettent de penser l'avenir, de se fixer des buts, de programmer les étapes pour atteindre ses objectifs, de s'organiser, d'auto-observer le déroulement pour effectuer des autocritiques, des corrections, des réajustements. Elles comprennent la persistance, la souplesse mentale et les capacités de s'adapter aux changements. Elles agissent à l'aide d'une composante appelée mémoire de travail, élément nécessaire pour mener une action.


La dernière étape est celle de l'acquisition des habiletés sociales, c'est-à-dire les capacités à percevoir et comprendre les messages, d'y répondre de manière adaptée. On les décompose en plusieurs strates. Les habiletés sociales de base consistent à savoir soigner son apparence, à savoir se présenter, à écouter les autres, à être capable d'initier une conversation avec eux, de répondre au téléphone, de remercier. Puis, on acquiert les habiletés sociales avancées avec la possibilité de s'excuser, de donner et de suivre des instructions, de demander et d'offrir de l'aide, de partager des activités, des biens, de pouvoir se préparer à une conversation ou un entretien. Elles nécessitent de savoir identifier et reconnaître ses émotions et celles des autres, de les exprimer à bon escient, de savoir distinguer et répondre à l'humour, l'ironie, la taquinerie. Elles supposent aussi de savoir accepter l'échec. La dernière strate des habiletés sociales est l'affirmation de soi. Faire valoir ses droits sans léser ceux des autres via la capacité à formuler et à répondre à des compliments, des demandes, des critiques et des refus permet d'exprimer clairement ses besoins et poser ses limites. Elles intègrent également la capacité de résolution de problèmes et évidemment elles permettent d'initier et de s'engager dans des relations amicales ou amoureuses.


Mais pour comprendre les autres, il faut avoir été compris. Et c'est là que le bas blesse. Car la différence neurologique des personnes atypiques est mal connue et reconnue. Il ne suffit pas d'apprendre à une personne autiste à se comporter comme une personne neurotypique pour qu'elle le devienne. Ces techniques seront comme un plâtre sur une jambe de bois si la personne autiste est mal accompagnée, voire non diagnostiquée comme telle. Il est aussi important d'apprendre à se connaître pour voir les choses autrement.


Le CRA de ma commune m'a diagnostiquée une psychose infantile due aux traumatismes et négligences parentales subies de l'enfance jusqu'à ma vie de jeune adulte. Ce psy est restée focalisée sur ma construction psycho-affective. J'aurai aimé que mes problèmes sensoriels et moteurs soient mieux étudiés. Dans le cas d'un diagnostic complexe et à l'âge adulte (50 ans), c'est une équipe pluridisciplinaire qui devrait obligatoirement faire l'évaluation et non un simple entretien par psychiatre plus habitué à diagnostiquer des enfants. Par la suite, en libéral, une psychomotricienne et une orthophoniste ont diagnostiqué des troubles DYS. Tout au long de ma vie, j'ai acquis des habiletés sociales (même si j'apprends à moins dire merci car cela peut être perçu comme une faiblesse). Cependant, il persiste des difficultés à initier et entretenir des relations amicales et amoureuses. De plus, ma résistance au stress est plus faible car le réservoir est déjà plein. Les choses de la vie quotidienne prennent beaucoup d'ampleur émotionnelle et m'amènent souvent à des réactions fortes.


En résumé

Pendant plus de 30 ans j'ai été suivie par plusieurs psychiatres et psychologues pour des difficultés socio-adaptatives. Dans les inefficacités des thérapies effectuées, par moi-même, j'ai appris à prendre soin de moi. C'est un long processus qui continue. Cela a commencé par me détacher du concept de « développement personnel » qui vise à mieux correspondre aux attentes sociales. Pour plus d'explications, cela fera l'objet d'un prochain article sur ce blog. En attendant, vous pouvez (re)lire le précédant article qui abordait l'injonction de résilience, consistant à pouvoir revenir d'un état de stress post-traumatique.


Il est donc vital de rechercher et d'intégrer les différentes dimensions de son neurodéveloppement qui auraient pu être entravées par des antécédents de maltraitance. Sans quoi, on croit se soigner mais on continue de subir. Plutôt que de suivre un raisonnement visant à poser un diagnostic en fonction des symptômes, il semble plus judicieux de se préoccuper des différents processus et dimensions développementaux atteints. En restaurant ces processus lésés par la maltraitance dans la cascade du neurodéveloppement, on augmente ses chances d'aller mieux. De plus, il faudrait d'abord traiter les traumas avant d'entreprendre à changer certaines habitudes dans la vie quotidienne (mieux manger, mieux dormir, faire une activité physique …).


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