Les émotions, pour exprimer ses besoins autistiques
Connaitre le rôle des émotions de base permet d'identifier ses besoins, comprendre l'intérêt de faire part de ses besoins pour améliorer la communication. Cependant, reconnaître l'existence de ses besoins ne va pas de soi, tant nous avons appris « à faire avec » et surtout « à faire sans ! ». La frustration générée porte souvent en elle le reflet du rapport à soi-même, dans la difficulté à exprimer ses besoins. Ainsi, réaliser que nous avons des besoins, et qu'il est important de les satisfaire pour pouvoir évoluer positivement, constitue une première étape essentielle pour avancer. Acquérir une culture émotionnelle
C'est précisément parce que les émotions ont un tel impacts sur notre vie qu'il est crucial de les connaître et de les comprendre. En septembre et octobre 2021, sur ce blog, l'identification et le rôle des émotions notamment dans le champ des TSA ont été décrits et approfondis. (Cf. S'autoriser à ressentir ses émotions et Les émotions et les troubles autistiques ).
Cependant, je n'ai pas abordé le sujet lorsque l'émotion devient un sentiment. En effet, la différence entre les émotions et les sentiments demande une clarification. Le sentiment est une construction socialement induite et se constitue sur des mélanges d'émotions (ex : haine, jalousie, frustration, honte, culpabilité, etc.). Les sentiments sont propres à chacun. Alors que l'émotion est une réaction physiologique à une stimulation qui se traduit dans un mouvement corporel et ne dure que quelques minutes, et est exprimée de la même manière par tous les humains quels que soient leur culture et leur âge. Autre différence, le sentiment est généralement dirigé vers un élément précis (une situation, une personne…), tandis que l'émotion peut ne pas avoir d'objet bien défini. Les sentiments sont donc des émotions conscientisées par notre cerveau et qui durent dans le temps et finissent toujours par s'exprimer dès lors que l'on interagit avec les autres.
Outils :
Pour acquérir une bonne culture émotionnelle, je vous propose plusieurs outils :
- la liste des 6 émotions de bases et les besoins couramment associés, car chaque émotion est toujours reliée à un besoin,
- la méthode « RULER », pour apprendre à identifier et à comprendre vos émotions d'une manière simple et efficace,
- un exercice d'ancrage, afin de se détacher de la souffrance émotionnelle,
- un guide de gestion de la colère, afin de diminuer l’emprise de la colère sur votre vie,
- un outil pour remettre en question vos pensées négatives
- les « Quatre grandes familles d’émotions » afin de lutter contre les pensées négatives
Repérer ses besoins et vérifier s'ils sont satisfaits
Il s'agit avant tout de repérer ses besoins, ceux qui sont satisfaits et ceux qui ne le sont pas, de comprendre comment faire en sorte que ces derniers le soient davantage, et enfin de se réconcilier avec certaines facettes des besoins insatisfaits qui pourraient laisser entretenir des pensées négatives.
Parmi les thèmes qui méritent réflexion, on peut citer le besoin d'estime de soi, d'être occupé voire débordé d'activités, le besoin de motivation personnelle, le besoin de créativité, le besoin de joie et d'enthousiasme, le besoin de paix intérieure et d'épanouissement, le besoin de relations qualitatives, le besoin d'indépendance, le besoin de travailler et de s'épanouir dans sa carrière, le besoin de confort financier et d'abondance, le besoin d'être en bonne santé.
La difficulté à exprimer ses besoins trouve souvent son origine dans la peur, quelle qu'en soit la forme (peur de l'échec ou peur de la réussite, peur de l'intimité et de l'engagement, peur de prendre des risques). Placer les besoins des autres avant les siens, négliger ses besoins ou déplorer de les voir trop peu respectés, est générateur d'amertume et de ressentiment, de honte et de culpabilité, de colère, de frustration et d'inquiétude, sentiments qui constituent des clés d'entrée fructueuses pour repérer les situations dans lesquelles les besoins sont trop peu satisfaits.
La pyramide de Maslow, également appelée « Pyramide des besoins » peut être d'une grande aide pour identifier ses besoins. Cette pyramide permet de classer les besoins humains dans 5 catégories par ordre d’importance. Cet ordre est établi selon des priorités et à chaque fois qu'un besoin est acquis, cela génère le désir d'un autre besoin.
La majeure partie des personnes qui composent notre société, arrivent au moins à satisfaire les trois premiers niveaux : c'est-à-dire de manger à sa faim, d'avoir un toit sur la tête et une famille. Les deux derniers – et surtout le dernier – sont par contre rarement satisfaits, bien qu’ils soient ceux qui nous apportent le plus de bonheur et de bien-être dans nos vies. Bien entendu, ces niveaux décrits ne sont pas des délimitations fermes et rigides. Par exemple, il est possible de satisfaire à 80 % nos besoins physiologiques, à 25 % les besoins de sécurité et à 5 % les besoins d’appartenance. L’intérêt de ce modèle est de nous donner une direction claire, de la hiérarchie de nos préoccupations à un instant donné.
Outils :
Pour acquérir une créativité émotionnelle, je vous conseille plusieurs outils :
- les Besoins universels classés par sentiments, afin de vérifier si ceux qui vous préoccupent sont satisfaits ou pas,
- la « Bousole intérieure » et son « Mode d'emploi », afin d'exprimer vos besoins les plus importants,
- le « Décodage sentiment-besoin » avec une grille pour noter si vos émotions/besoins sont comblés ou pas.
Désactiver le pilote automatique
La communication non violente (CNV) est une technique qui permet de se connecter à l'autre pour ensuite chercher ensemble un moyen de satisfaire les besoins de chacun. Le fondateur de cette méthode de communication est l'Américain Marshall Rosenberg (1934-2015). Ce psychologue a mis le doigt sur la violence de notre langage au quotidien. Parfois, sans nous en rendre compte, nous utilisons le chantage, la menace, l'exigence pour parvenir à nos fins... avec souvent un piètre résultat à la clé. Il a développé une manière de communiquer qui nous permet de comprendre davantage l'autre. « Nous apprenons à nous exprimer clairement et honnêtement, tout en faisant preuve de respect et d'empathie envers les autres. Chaque contact conduit ainsi à une reconnaissance approfondie de nos propres besoins et de ceux de l'autre. Derrière son apparente simplicité, ce principe transforme d'une manière puissante », écrit-il dans son livre "La Communication non violente au quotidien" (Jouvence, 2003).
Selon Rosenberg, il est important de se concentrer très attentivement sur 4 points lorsque l'on communique : ce que l'on observe, ce que l'on ressent, ce dont on a besoin et ce que l'on demande à l'autre de faire. Une conversation se déroule selon les étapes suivantes. Imaginons que vous arriviez à saturation parce que vous avez beaucoup trop de choses à gérer. La premier réflexe est souvent de crier votre impuissance : « c'est toujours moi qui doit tout faire ici ! ». Vous n'obtiendrez généralement qu'un démenti de la part de l'autre. En CNV, vous pouvez dire : « je remarque que j'ai une semaine extrêmement chargée (observation), je suis irrité (sentiment) parce que j'aimerai plus de collaboration (besoin). Qu'en penses-tu ? » (question) ou « puis-je te confier une tâche ? » (demande). Cette formulation ne garantit pas une réaction immédiate, mais cela crée davantage de connexion qu'un cri d'exaspération, et l'autre se sentira nettement moins agressé, puisque vous parlez de vous et non de lui. Cet art consiste donc à ne pas réagir en pilote automatique, mais à prendre conscience de ce pilote, à le désactiver, tout en identifiant le besoin que dissimule votre reproche. La CNV fonctionne également lorsque quelqu'un vous adresse une critique. Au lieu de passer sur le mode défensif, vous pouvez essayer de chercher le lien.
Outils :
Pour vous exercer à la CNV, je vous présente quelques outils :
- l'outil OSBD (pour observation, sentiment, besoin, demande), qui favorise aussi l'affirmation de soi,
Se construire une créativité émotionnelle
Le plus important réside dans la prise de conscience de ses besoins et dans la reconnaissance de leur importance. Minimiser l'importance de son besoin et la nécessité de le satisfaire peut facilement conduire à une forme de fatalisme et contribue à dégrader l'estime de soi. Dès lors que vous vous sentez capable de trouver des solutions pour résoudre cette insatisfaction, vous sortez du piège ! Vous êtes alors prêt à imaginer une autre réalité et vous savez disposer des ressources pour la construire.
Pour vous y aider, je vous encourage à être accompagné par un coach. En effet, il vous épaulera pour vous sentir pleinement légitime dans la satisfaction de vos besoins, vous aidera à identifier ce qui vous a incité à les négliger. Puis, il vous guidera à mettre en place des solutions, notamment celles que vous avez en tête depuis longtemps sans avoir jamais osé les mettre en œuvre.
Je terminerai cet article par une citation de Sénèque « Ce n’est pas parce que c’est difficile qu’on n’ose pas, c’est parce qu’on n’ose pas que c’est difficile ».
Et vous ?
A la lecture de cet article, citez deux besoins qui ne vous semblent pas suffisamment satisfaits dans votre vie. De quoi avez-vous besoin concrètement ?
Si vous aviez le choix, à quoi ressemblerait votre situation ? Quelle différence cela ferait-il dans votre vie ?
Si sur une échelle de 1 à 10, où vous situez-vous aujourd'hui ? Où voudriez-vous être ? Combien de pas voulez-vous faire ? Est-ce un grand saut ?
Pour aller plus loin :
- Un extrait des Vigi’Fiche du Crehpsy des Pays de la Loire,
- Le Groupe Facebook de Sylviane Massi, pour les personnes autistes : https://www.facebook.com/groups/564022690917301/learning_content.
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