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Parler du handicap lors de l'entretien de recrutement


La situation des personnes en situation de handicap face à l'emploi repose sur un étonnant paradoxe.


D'un côté, les entreprises, stimulées par l'obligation d'emploi, mettent en place des politiques parfois ambitieuses pour faciliter le recrutement de collaborateurs handicapés. Suite à l'entrée en vigueur de la loi du 11 février 2005, certaines sont même allées jusqu'à pratiquer la « chasse » aux candidats handicapés pour atteindre le quota fatidique des 6 % et ainsi s'exonérer de la contribution annuelle à l'AGEFIPH ou au FIPHFP. Sur les quelques 100 000 entreprises théoriquement soumises à l'obligation d'emploi, près des trois-quarts se sont ainsi engagées dans le recrutement de personnes handicapées. Une belle avancée qui bute toutefois souvent sur le même constat : « Nous ne trouvons pas de candidats. Où sont donc les travailleurs handicapés ? ».


De l'autre côté, le taux de chômage des personnes en situation de handicap reste particulièrement élevé et proche du double du taux national. L'offre et la demande existent donc bel et bien, mais force est de constater qu'elles peinent à se rencontrer. De fait, le profil moyen des demandeurs d'emploi handicapés cadre mal avec les attentes de l'entreprise et les critères ordinaires de recrutement. Au-delà des freins liés au handicap et aux phénomènes de censure réciproque qu'ils peuvent engendrer, les personnes handicapées sont statistiquement moins diplômées et plus âgées que l'ensemble de la population. Ainsi, un tiers des personnes handicapées en recherche d'emploi est âgé de plus de 50 ans et la moitié est au chômage depuis plus d'un an. Autant de critères cumulés qui ne résistent pas à la « machine à éliminer » du recrutement...


Accorder du temps au recrutement

Compte tenu de la spécificité de cette population, la pratique de la logique standard mais élitiste de recrutement en nombre ne laisse à l'entreprise pratiquement aucune chance de recruter des personnes handicapées. D'une part, elles sont statistiquement moins nombreuses que les candidats ordinaires, et d'autre part, leur profil ne correspond fréquemment pas a priori aux attentes formulées. A cela peuvent s'ajouter des parcours parfois atypiques ou irréguliers, liés aux périodes de survenance du handicap, aux problèmes de santé associés ainsi qu'aux éventuelles reconversions conduisant certaines personnes à être débutantes dans un métier à plus de 40 ans, par exemple.


La réussite d'une politique d'ouverture du recrutement aux personnes handicapées passe par une mobilisation de tous les niveaux de la hiérarchie. Il est notamment indispensable de réfléchir en terme de budget d'effectifs, afin que le temps nécessaire à la formation ne soit pas supporté par le manager et l'équipe. La question du temps se retrouve aussi dans le délai pouvant être nécessaire à l'étude et à la mise en oeuvre des autres compensations. Un facteur clé de succès du recrutement, et au-delà, de toute action dans le domaine du handicap et notamment le maintien dans l'emploi de personnes handicapées, est la capacité d'anticipation. Cela implique de revisiter les processus standard de recrutement, qui privilégient quasiment l'urgence et la réponse immédiate aux besoins.


La construction d'un sourcing spécialisé auprès du réseau Cap Emploi ou de cabinets spécialisés et identifiés comme tels peut élargir le nombre de candidatures et permettre de se créer un vivier, favorisant l'anticipation et préparant l'intégration par l'évaluation, en amont, des compensations.


Outils :

- Fiche Recruteur : l'entretien d'embauche

- La réglementation spécifique au handicap


Parler en positif de son handicap

Sur un autre plan, est-il pertinent que la personne en situation de handicap mentionne son statut dans son CV ou la lettre de motivation, voire une fois qu'elle est en poste ? Tout dépend de deux facteurs essentiels.


Le premier repose sur les besoins du candidat. S'ils sont indispensables dans la durée pour la tenue du poste et qu'aucune compensation personnelle ne peut être envisagée sur le moyen ou le long terme, il paraît préférable de les exprimer pour éviter un échec mutuel fondé sur des malentendus, doublé d'une dégradation de l'état de santé de la personne. Généralement, il est préférable d'envisager la description précise des besoins lors de l'entretien plutôt que dans la candidature elle-même car elle pourrait, à ce stade précoce, être vecteur de craintes supplémentaires pour le recruteur. De plus, ces besoins peuvent se révéler plus ou moins prégnants selon le contexte précis dans lequel l'emploi s'exerce. Toutefois, si des compensations sont nécessaires pour la phase d'entretien elle-même (par exemple nécessité d'une accessibilité aux locaux dans lesquels se déroule le recrutement pour une personne en fauteuil, traducteur LSF pour une personne sourde...), cela doit être précisé en amont pour éviter toute déconvenue, voire une impossibilité de réaliser l'entretien.


Le deuxième facteur dépend de la position de l'entreprise. En effet, plus celle-ci affichera son ouverture au sujet du handicap et de la diversité, plus il sera possible à la personne handicapée d'exposer sa situation et ses besoins. C'est pourquoi il est important pour le candidat de se renseigner sur la structure dans laquelle il postule et, pour l'entreprise, de faire connaître sa démarche en la matière via son site de recrutement, sa communication externe ou tout autre moyen. Un climat de confiance sur le sujet est un préalable important à sa gestion sereine par toutes les parties.


Enfin, il est préférable d'éviter d'utiliser des termes comme « incapacité », « restriction médicale », « difficulté », « problème » et leur préférer des vocables plus neutres comme « conséquence » ou « besoins spécifiques ». Au-delà du seul recrutement, et notamment dans le management au quotidien ou le maintien dans l'emploi, ces éléments concernant la manière d'aborder le handicap peuvent se transposer à toutes les étapes de la gestion de carrière.


Outils :

- Fiche Candidat : l'entretien d'embauche

- Comment présenter le handicap

- Autres articles sur le sujet de l'emploi des personnes en situation de handicap


Expliquer une discordance

La personne en situation de handicap « n'est pas son handicap ». Etant donné que le handicap est aujourd'hui associé à des représentations majoritairement négatives, on comprend aisément que la réduction d'une personne à son handicap peut avoir des implications défavorables. Recruter « un handicapé » pourra être perçu comme embaucher principalement le handicap, quand le travailleur handicapé souhaitera être reconnu pour ses compétences personnelles.


En milieu professionnel, un manager pourra avoir des freins à l'idée d'accueillir un « handicapé » dans son équipe, alors qu'il sera sans doute plus ouvert s'il s'agit d'analyser objectivement les compétences d'un candidat ou d'un collaborateur handicapé. Pour sa part, un travailleur handicapé non déclaré sera probablement réticent à faire connaître sa situation à son employeur et à son collectif de travail si cela entraîne pour lui le passage du statut social de salarié à celui de « handicapé ».


Dans un monde sous pression, en recherche permanente de repères, où l'individu, en quête de sens, s'interroge régulièrement sur sa place et son rôle dans son environnement professionnel, les sujets du handicap, de la diversité et de la singularité, formidables vecteurs d'innovation et de progrès social, peuvent constituer une réponse efficace. Quelle personne, quelle structure et plus encore quelle société peut aujourd'hui se priver d'une telle opportunité ?


Et vous ?

Le handicap est-il une contrainte ou une opportunité pour l'entreprise ?

Selon vous, pourquoi les entreprises ont-elles peur d'embaucher une personne handicapée ?

Quelles solutions pour lutter contre la discrimination liée au handicap ?

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