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Programme de rétablissement en santé mentale du C2A de Bergerac

Dernière mise à jour : 15 juil. 2021


Force est de constater que, si le mouvement de la psychothérapie institutionnelle a réussi à ouvrir les portes de l’asile, la politique du secteur n’a pas réussi à permettre leur réinsertion. Le développement de la réhabilitation psychosociale, très disparate d’un territoire à l’autre, tente aujourd’hui de remédier à cette situation. Mais l’isolement social et une qualité de vie très faible accompagnent souvent les personnes vivant avec un trouble psychique chronique.


Des structures de réhabilitation psychosociale travaillent aujourd’hui pour soutenir le retour à la vie sociale des personnes. Elles ont pour mission de permettre le rétablissement fonctionnel. Les soins prodigués aident progressivement les personnes à acquérir des compétences utiles pour développer leur projet de vie, notamment dans le champ professionnel et celui du logement. Cependant ces structures sont encore peu nombreuses et parfois peu attractives pour les usagers car souvent développées dans d’anciens hôpitaux de jour. La forte stigmatisation attachée à l’hôpital psychiatrique amplifie le rejet. Quant aux familles, elles disent souvent avoir du mal à se sentir impliquées dans les projets de soins développés.


Un projet inscrit une démarche d’innovation

Depuis 3 ans, l’Hôpital Vauclaire développe avec le C2A de Bergerac un modèle innovant de centre de formation au rétablissement s’inspirant des exemples anglo-saxons des Recovery College1. Le C2A est librement accessible aux personnes de 18 à 35 ans en situation de vulnérabilité psychique (troubles schizophréniques, troubles bipolaires, dépressions sévères, addictions) et aux familles. Il est complémentaire des soins médicaux psychiatriques dispensés par l’hôpital (urgences, hospitalisation, suivi ambulatoire) ou par les psychiatres de ville. Le projet C2A vise donc à former les personnes vivant avec un trouble psychique durable à la démarche de rétablissement et à les accompagner tant qu’ils le jugent nécessaires.

S’appuyant sur les recommandations de l’OMS, le C2A considère qu’une bonne qualité de vie passe par une bonne santé pensée en termes de bien-être physique, mental et social. Ce bon niveau de bien-être global permet à la personne de retrouver une bonne capabilité indispensable à son rétablissement et au redéploiement de son projet de vie.


Le programme et les objectifs

Si le C2A est efficace pour améliorer de manière significative la qualité de vie des personnes accompagnées, c’est parce qu’il agit sur des facteurs essentiels pour :

- Améliorer la qualité de vie des personnes concernées grâce à un haut niveau de rétablissement

- Améliorer la qualité de vie des familles à tous les stades de la maladie de leur proche

- Favoriser la prévention et l’intervention précoce

- Soutenir le développement de la pair-aidance

- Promouvoir le rétablissement et le modèle innovant C2A

S’engager dans des pratiques soignantes orientées rétablissement implique un changement profond de posture soignante. Le positionnement quitte une certaine verticalité (savoirs experts, autorité, pouvoir) pour tendre vers une horizontalité (savoirs expérientiels, liberté, confiance). Dispositif hybride de soin psychothérapique et de formation (ETP), centré sur la prévention, la promotion et l’éducation à la santé, le C2A est piloté par un psychologue coordinateur. L'équipe est constitué d'une enseignante en Activités physiques adaptées, d'une diététicienne, d'un praticien en médiation de pleine conscience, deux psychologues coordonnateurs de parcours en rétablissement, d'une attachée de recherche clinique, d'un pair-aidant ressource en santé mentale, complétée d'intervenants ponctuels (pharmacien, infirmières en addictologies, assistance sociale, etc.).


L’importance du projet de vie et des savoirs expérientiels

L’alliance naît de la capacité du thérapeute à centrer son action sur le projet de vie de la personne accompagnée : se mettre au service de ses rêves, l’accompagner pour qu’elle tente de les réaliser. C’est toute la dimension humaniste de cette nouvelle posture. Elle implique de travailler à la mise à jour des forces et des vulnérabilités de la personne. Cela améliorera aussi la confiance en soi et l’estime de soi souvent très impactées. Ce sera aussi le moment de bien identifier les valeurs importantes de la personne, celles qui contribuent à donner du sens à son existence, et qui lui permettent de savoir que tel choix l’en rapproche ou l’en éloigne. Le travail préparatoire sur la clarification du projet de vie, des forces, des vulnérabilités et des valeurs constitue la première étape de l'accompagnement individuel avec le psychologue coordonnateur de parcours en rétablissement (diagnostic éducatif). Le psychologue coordonnateur va aider la personne à planifier ses actions, à trouver les soutiens dont elle a besoin et à évaluer les résultats régulièrement. Les bilans chiffrés réalisés tous les 6 mois permettent de faire un point d’étape et de visualiser les progrès accomplis (renforcement positif) et les difficultés restantes. Ils permettent de réévaluer les actions dans une dynamique de changement progressif.

La relation privilégie une posture d’écoute, de partage, d’empathie et de co-construction. Les savoirs utiles viennent autant du coordonnateur (savoirs experts) que de la personne (savoirs expérientiels). La valorisation de ces derniers rééquilibre la relation dans une dynamique de collaboration et de respect mutuel. Accompagner l’autre dans sa démarche de rétablissement demande au psychologue coordonnateur de devoir en permanence identifier ses propres ressources et de réajuster son accompagnement en conséquence. Au final, le psychologue coordonnateur se doit de réaliser le même travail que la personne dans l’identification des limites à ne pas dépasser pour sauvegarder un bon équilibre de vie. Récemment, en réponse à un appel à projet, la Fondation de France a souhaité soutenir le projet C2A et s’engage financièrement pour nous aider à rémunérer des interventions de pairs aidant ressources au sein du C2A.

L'évaluation de l’efficacité du dispositif C2A

Le C2A étant un dispositif innovant, dès le début de cette expérimentation, le coordinateur a souhaité pouvoir rendre compte de l’efficacité d’une formation et d’un accompagnement au rétablissement, proposés en plus des soins psychiatriques classiques. Le critère qui a semblé rendre compte de l’amélioration de la situation d’une personne qui se rétablit est celui de la qualité de vie.

Les résultats par auto-évaluation et par auto-test validé vont dans le même sens : le C2A améliore nettement la qualité de vie des usagers. Initialement située autour d’un niveau moyen, voire faible, elle atteint un niveau nettement supérieur, que ce soit après un an ou 2 ans de participation au C2A. Ces résultats chiffrés corroborent les témoignages des usagers qui évoquent une amélioration importante de leur vie avec le C2A.

L’amélioration concomitante de l’estime de soi, de la confiance en soi et du sentiment d’efficacité personnelle, en partie due à l’activité physique adaptée, constitue le moteur de la démarche de rétablissement. Avec le retour de l’espoir, la personne croit à nouveau en un avenir possible et se relance dans des actions signifiantes, dont la réussite a un effet de renforcement positif et d’entraînement. Les séances d’activité physique, en individuel mais surtout en groupe, facilitent aussi le retour à une certaine forme de socialisation et contribuent à lutter contre le sentiment d’isolement, source d’anxiété et de dépression. Cette amélioration du bien-être global, tant physique que psychique et social, se traduit au final par une amélioration de la qualité de vie.


Le C2A participe régulièrement à des colloques et des enseignements pour promouvoir le rétablissement et le modèle innovant C2A. Tous les professionnels de l’équipe travaillent à la rédaction d’articles et sont engagés dans une démarche de recherche autour du rétablissement en santé mentale de l’adulte. Le coordonnateur encourage la duplication de ce dispositif sur d'autres territoires français avec la collaboration de pair-aidants ressources qui lui semble indispensable.


Pour voire le replay : https://youtu.be/ozD2UtI1tnM


Intervenant : Antony Robin est psychologue sur le Pôle Bergerac de l’Hôpital Vauclaire (Dordogne) et coordinateur du dispositif C2A.

Ces coordonnées : 05 53 27 45 49 / 06 22 88 55 20 ou par mail : antony.robin@ch-vauclaire.fr


1/ Les Recovery Colleges sont des lieux d’apprentissage, complémentaires des lieux de soins, permettant aux personnes d’acquérir des connaissances et des habiletés favorisant leur rétablissement. Le contenu des apprentissages est enrichi tant par les intervenants qui animent les groupes que par les usagers eux-mêmes (savoir expérientiel) et leur entourage. Les Recovery Colleges permettent aux personnes de prendre une part active à l’amélioration de leur santé mentale, et de retrouver une place de citoyen dans la société. Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Est-de-l’Île-de-Montréal (2017). Les Recovery College : https://www.youtube.com/watch?v=q9cNeW7knxI

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